Le plein emploi est mort, vive l’avenir ! | Le Cercle Les Echos
Article publié par Le Cercle Les Echos, le plein emploi est aujourd’hui remis en cause par la raréfaction du travail. Un phénomène induit par le progrès technique : une tribune pour enfin se poser les bonnes questions à propos de l’emploi.
Avouons-le crûment : le chômage ne va pas se résorber. Quant au plein emploi, il ne reviendra pas ! Les 30 glorieuses sont définitivement finies ; l’organisation de la société issue de l’après-guerre ne fonctionne plus. Il faut changer la société et ses règles, mais aussi trouver un nouveau modèle d’organisation plus adapté à la réalité de la société dans laquelle nous vivons.
Dans cette société, la croissance trouve ses limites. Elle n’est pas infinie puisque la planète est finie. Les ressources sont limitées : énergies fossiles, terres arables, eau douce, minerais, faunes et flores… Nous consommons plus aujourd’hui que la terre n’est capable de fournir. Sans prôner la décroissance, et en restant optimiste sur les opportunités de croissance verte ou durable, force est de constater que les lendemains ne sont pas à la fête.
Dans cette société, la technologie n’a pas fini d’automatiser les tâches répétitives, manuelles comme intellectuelles : elle n’a pas fini non plus de concentrer les activités entre les mains d’acteurs dominants. Avant-hier, la technologie a mécanisé l’agriculture, augmenté les rendements et provoqué l’exode rural. Hier, elle a délocalisé l’industrie, robotisé ce qui pouvait l’être et mis les ouvriers devant le fait accompli. Aujourd’hui, elle s’attaque aux services, aux commerces de proximité (libraires, magasins d’électroménager, etc.), aux intermédiaires commerciaux (agences immobilières, de voyages, etc. – ou encore aux métiers administratifs. Demain, avec la voiture sans conducteur, elle s’attaquera aux taxis, aux chauffeurs routiers et à l’industrie automobile, déjà mal en point. Avec les robots domestiques, elle s’attaquera finalement aux services à la personne [ménage, personnes âgées, coiffeurs, etc.]. Tout ça, bien sûr, pour plus d’efficacité et de productivité.
Dans cette société, la mondialisation est déjà de l’histoire ancienne. La question n’est plus de démondialiser ou de relocaliser. Ce ne sont pas les Chinois, les Asiatiques ou les émigrés qui nous volent notre travail : il n’y a plus de travail pour tout le monde, et eux aussi commencent à souffrir du chômage. Aujourd’hui, quand des sociétés comme Apple relocalisent, ce n’est pas pour remplacer des milliers d’ouvriers asiatiques mal payés par des ouvriers américains syndiqués, mais pour confier à des robots ce que lesdits milliers d’ouvriers faisaient auparavant.
– Non, nous ne ferons pas revenir le plein emploi en prônant le « made in France » et la qualité au détriment du prix : ce serait à la fois désuet et irréaliste vu l’état de nos portefeuilles.
Extrait de lecercle.lesechos.fr