Car comme la chasse, le marketing est extrêmement décrié. Il manipule les gens, il leur fait acheter des choses dont ils n’ont pas besoin, il est intrusif, ne respecte pas la vie privée, pollue avec les prospectus dans la boîte aux lettres, les sorties de ville pleine de panneaux, les panneaux lumineux…
La détestation est générale au point que la Convention Citoyenne pour le Climat a proposé des mesures pour réguler la publicité telles que interdire la publicité des produits les plus émetteurs de GES, sur tous les supports, réguler la publicité pour limiter les incitations quotidiennes et non choisies à la consommation et mettre en place des mentions pour inciter à moins consommer.
C’est oublier rapidement que le marketing est indispensable au succès d’une entreprise et de l’économie en général. Le marketing est nécessaire pour innover, imaginer de nouveaux produits et services qui répondront aux attentes des consommateurs. Le marketing est incontournable pour adresser de nouveaux marchés et de nouveaux usages. Le marketing est vital pour trouver des clients et vendre, et ainsi produire, payer des salaires et des impôts.
Point d’économie sans marketing, les pays soviétiques s’en souviennent ! Point de champion français non plus sans marketing ! Même les ONG ont besoin de marketing ! Car sans marketing elles n’auraient pas de contributeurs et de ressources. Alors halte au marketing bashing et cherchons à raison à garder en ne jetant pas le bébé avec l’eau du bain !
Les bons et les mauvais produits !
Il peut effectivement y avoir des bons produits (ou services) et des mauvais produits, les deux auront besoin de marketing pour être vendus et trouver leur marché. Est-ce le marketing qu’il faut décrier ou les produits en eux-mêmes ?
Plus personne ne nie que la cigarette est mauvaise pour la santé et que manger des légumes frais en revanche est bon pour la santé. Faut-il pour autant interdire la publicité en général pour la cigarette et les légumes ? Interdire la publicité uniquement pour les cigarettes comme c’est le cas actuellement ? Ou encore interdire simplement la cigarette ? La question se pose ?
Est-ce que la demi-mesure qui consiste à interdire la publicité d’un produit nocif pour la santé, l’environnement, etc., plutôt qu’interdire le produit lui-même a du sens ? On pourrait penser que oui. Se faisant, le produit reste autorisé, et donc accessible pour ceux qui ne peuvent plus s’en passer. Il n’est pas promu en revanche auprès de ceux qui ne l’utilisent pas encore. On limite ainsi sa diffusion sans pour autant atteindre aux libertés de ceux qui l’utilisent. Ces mesures vont dans le même sens que celles de taxation différenciée en provoquant des incitations à moins consommer ces produits nocifs.
Elles reconnaissent ainsi l’efficacité de la publicité en constatant qu’interdire la publicité permet de réduire la consommation. Elles nuisent en revanche à l’image de la publicité en donnant le sentiment que c’est la publicité qui est mauvaise par elle-même et non le produit.
Les bons et les mauvais canaux !
Depuis plusieurs années maintenant, le débat fait rage aussi entre les bons canaux marketing et les mauvais canaux, entre l’Inbound Marketing qui consiste à attirer les clients vers soi avec des contenus de qualité et l’Outbound Marketing qui consiste à les interrompre en les dérangeants comme la publicité dans les médias traditionnels, les e-mails non sollicités, etc.
Ce faisant, ce débat que j’ai moi-même alimenté en tant que pionnier de l’Inbound Marketing en France, a entraîné de nombreux annonceurs vers de mauvais choix, en renonçant à des approches marketing et commerciales efficaces pour eux. En B2B la prospection téléphonique reste extrêmement efficace et nécessaire sur certains marchés. Idem pour la publicité TV en B2C qui peut être un espace d’expression et de création riche et foisonnant tout en étant rentable pour l’annonceur et utile pour le consommateur.
Le RGPD s’est aussi emparé du sujet au titre de la vie privée en interdisant la collecte de données non consentie. Cette loi européenne limite ainsi les pratiques de spamming e-mail, de ciblages publicitaires, etc. Néanmoins, j’ai le sentiment que le RGPD est contre-productif. Il handicape les acteurs émergents qui cherchent à innover, sans limiter pour autant les pratiques des spammeurs qui opèrent depuis l’étranger sur le Dark Web, ni celles des GAFA qui ont le pouvoir nécessaire pour inciter les clients à accepter l’ensemble de leurs Conditions Générales d’Utilisation, collecte et utilisation commerciales des données incluses.
Dans ce domaine, il est ainsi difficile de séparer le bon grain de l’ivraie, il n’y a pas pour moi de bons ou de mauvais canaux marketing, mais des bonnes ou mauvaises pratiques et celles-ci sont très difficiles à réguler.
Les bons et les mauvais marketeurs !
Nous en arrivons à la question ultime du bon et du mauvais marketeur.
Qu’est-ce que fait un bon marketeur ? Il met le client au centre. Il imagine le produit ou service le plus adapté pour le client, qui répond à ses problématiques et réduit ses difficultés. Il met en place un dispositif permettant de faire connaître ce produit auprès de ses clients potentiels et accompagne le client dans son parcours jusqu’à l’achat.
Qu’est-ce que fait un mauvais marketeur ? Il met son entreprise au centre. Il imagine le produit ou service le plus adapté pour l’entreprise, qui répond à ses problématiques et réduit ses difficultés. Il met en place un dispositif permettant de faire connaître ce produit auprès de ses clients potentiels et force le client dans son parcours jusqu’à la vente.
Vous le voyez, la différence est subtile, et il en tient plus à la nature humaine qu’à la nature profonde du marketing qui, comme toute discipline, est un outil au service de ce que les hommes en font. Tout comme la biologie peut produire des vaccins et des armes bactériologiques, la physique de l’énergie pas chère ou des armes nucléaires, le marketing peut produire le meilleur et le pire. À vous de voir quel marketeur vous souhaitez être !
Alors pour conclure “Y’a le mauvais chasseur : y voit un truc, y tire, c’est sûr… Alors là on le reconnaît à la ronde. Mais le bon chasseur : y voit un truc, y tire, mais… c’est un bon chasseur quoi ! Bon, d’toutes façons, c’est des questions à la con ça…”