Interview d’Ilana Soskin, avocate spécialisée en e-réputation

 

Gabriel Dabi-Schwebel : Bonjour Ilana Soskin, vous êtes avocate spécialisée en droit de la presse et vous vous occupez plus particulièrement de faire respecter la réputation de vos clients sur internet. En quoi cela consiste-t-il ?

Ilana Soskin : Mon cabinet intervient en complément des agences d’e-réputation comme 1min30.com afin de faire supprimer des contenus nuisibles à la réputation d’une société ou d’une personne physique. Les agences d’e-réputation font un excellent travail de fond pour améliorer l’image de leurs clients, notamment en terme de référencement ou de contenus positifs. Il s’avère toutefois parfois nécessaire de combiner cette politique de communication par des procédures judiciaires visant à faire supprimer des articles ou des propos dénigrants sur internet, ou, à tout le moins, à faire déréférencer les articles des moteurs de recherche.

 

Gabriel Dabi-Schwebel : Que peut-on légalement faire supprimer ?

Ilana Soskin : Judiciairement, il est possible de demander aux éditeurs de sites internet (ou aux hébergeurs, comme par exemple des sites d’avis ou des forums) de supprimer les propos diffamatoires, c’est à dire qui portent atteinte à l’honneur et la considération d’une société ou d’un particulier. Les propos injurieux peuvent également faire l’objet d’une demande de retrait. Il en est de même des photographies de personnes mises en ligne sans leur autorisation ou encore des propos portants atteinte à la vie privée de particulier. Pour les sociétés, il s’agira le plus souvent de commentaires excessifs dépassant la liberté d’expression, ou encore de faux avis par exemple.  Concernant la diffamation et l’injure, il faut toutefois agir dans le délai de prescription de 3 mois et donc être particulièrement réactif. La politique de veille internet menée par les agences d’e-réputation permettra le plus souvent d’agir à temps.

 

Gabriel Dabi-Schwebel : Est-il possible de demander le déréférencement de pages internet sur des moteurs de recherche comme Google lorsque l’on ne parvient pas à faire supprimer un commentaire ou un article ?

Ilana Soskin : Les demandes de suppression de référencement sur les moteurs de recherche sont possibles dans les mêmes conditions que les demandes de suppression d’article ou de commentaires, c’est à dire en cas de diffamation, d’injure, d’atteinte au droit à l’image ou à la vie privée. En pratique, il est fréquent de demander aux moteurs de recherche de supprimer les liens vers des articles ou des pages que la société ou le particulier n’auront pas réussi à faire supprimer directement auprès de l’éditeur ou de l’hébergeur soit par ce que le site n’a jamais répondu, soit par ce que les contenus sont hébergés à l’étranger par exemple. Les moteurs de recherche comme Google demandent toutefois que le requérant justifie que les démarches entreprises directement auprès de l’auteur ou l’éditeur n’ont pas abouti. Les personnes physiques peuvent également demander le déréférencement de pages internet sur le fondement de la loi sur les données personnelles, ce sans qu’il soit nécessaire que la demande de suppression de ces informations soit sollicitée préalablement ou simultanément à celles des pages internet d’où les informations sont issues.

 

Gabriel Dabi-Schwebel : Justement, suite à la décision rendue le 13 mai 2014 par la Cour de Justice de L’Union Européenne (CJUE), Google a mis en place un formulaire de demande de retrait, qu’en est-il dans la pratique ?

Ilana Soskin : Tout d’abord, s’agissant de la protection des données personnelles, il est important de rappeler que la demande peut être formulée si les informations entrent dans le champ d’application de la définition des données personnelles, à savoir  « toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres ». Si tel est le cas, la demande de suppression de données peut être formulée « même lorsque leur publication en elle-même sur lesdites pages est licite », ce qui signifie que la mention du nom de la personne n’a pas besoin d’être compromettante (diffamatoire ou injurieuse par exemple) pour que l’internaute puisse en demander la suppression des moteurs de recherche. Toutefois, pour pouvoir solliciter le déréférencement d’un lien, la demande ne doit pas être attentatoire à la liberté d’expression et notamment, si la personne est connue ou si « pour des raisons particulières, telles que le rôle joué par ladite personne dans la vie publique » la mention de son nom « est justifiée par l’intérêt prépondérant dudit public à avoir, du fait de cette inclusion, accès à l’information en question. ». Depuis la mise en ligne du formulaire de« droit à l’oubli », Google dit avoir accepté environ 50 % des demandes. Ce chiffre n’a rien de surprenant car Google s’est toujours opposé par principe à être considéré comme un régulateur des contenus en ligne. Dans son formulaire, Bing demande d’ailleurs à l’internaute de préciser «  la raison pour laquelle vous pensez que ces informations doivent être protégées sans méconnaître la liberté d’expression, le libre accès à l’information ou aucun autre objectif d’intérêt général ». Dans les hypothèses où la liberté d’expression est susceptible d’être affectée par le déréférencement, en l’absence de décision d’un juge, il est délicat pour les moteurs de recherche de supprimer des pages ou des articles. C’est pourquoi, dans les faits, il est plus efficace de solliciter le déréférencement d’une page par le biais d’une procédure judiciaire, notamment dans le cadre de procédures qui peuvent être mises en place très rapidement grâce à une procédure accélérée.

Gabriel Dabi-Schwebel : Un dernier conseil pour les sociétés ?

Ilana Soskin : Il est primordial de procéder à une veille régulière des contenus publiés sur une société, notamment en confiant cet aspect de l’e-réputation à une société experte. Il est conseillé d’agir de manière ciblée, je dirai presque chirurgicale sur chacun des contenus, en gardant à l’esprit que plus les choses restent longtemps accessibles, plus elles se répandent – souvent de manière exponentielle-.

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Gabriel Dabi-Schwebel

Ingénieur de formation j’ai commencé ma carrière dans le conseil en télécom et en média. J’ai aussi monté de multiples projets entrepreneuriaux, marque de bijoux, bar à jus de fruits, éditeurs de logiciel avant de créer 1min30 en 2012, la première agence en Inbound Marketing en France. Avec 1min30, nous avons piloté les stratégies digitales de centaines d’entreprises mais aussi développé un blog qui a plus de 300K lecteurs par mois, une communauté de plus de 100K abonnés sur l’ensemble des nos réseaux sociaux et une maison d’édition dans laquelle nous publions nos livres et ceux de nos clients. Depuis 2017, je suis ainsi l’auteur et coauteur de 8 livres sur le marketing et la vente, dont 5 de méthodes basées sur l’intelligence collective : Acquisition Strategy Design, Customer eXperience ReDesign, Brand Strategy Design, Q2C Selling et 3 méthodes marketing pour les RHs Aujourd’hui, 1min30 fait partie des 3 plus grandes agences HubSpot en France. Nous avons fait des intégrations les plus complexes notre spécialité et proposons à nos clients un accompagnement complet sur la solution alliant conseil, intégration, formation et agence. Contactez moi si vous souhaitez dépasser les objectifs de leur investissement CRM.