Une stratégie de contenu complètement timbrée

La Poste a récemment lancé un nouveau bloc de timbres consacré au patrimoine français. Si les illustrations aux couleurs tendres raviront sûrement les philatélistes, les autres usagers seront quant à eux perplexes face à ce carnet de timbres hybride, sur lequel ont été greffés d’étranges contenus marketing…

Un objet pour le moins déconcertant

Dressons le portrait-robot de l’accusé, qui usurpe le nom de « carnet de timbres ». En fait de carnet, c’est un mini-livret de 12 pages (dont seulement trois sont réservées aux timbres postes…) qui compile :

  • Des informations sur le patrimoine français
  • Une multitude de publicités, sur lesquelles nous reviendrons
  • Des jeux et devinettes
  • 12 timbres détachables, perdus au sein de tout ce contenu.

Promouvoir le patrimoine français, vraiment ?

Selon la présentation qu’en fait La Poste, le but de ce carnet atypique est de « célébrer le patrimoine de la France dans toute sa diversité architecturale, culturelle et archéologique ». Promouvoir le patrimoine français, on est pour ! Mais alors, jouons le jeu jusqu’au bout et parlons un français noble… Dommage : le titre de la série (« La France comme j’aime ») n’a, de toute évidence, pas été très attentif à la promotion de notre belle langue. La France que j’aime ou la France telle que je l’aime auraient été des choix autrement plus pertinents !

Un support inadéquat

Proposer des contenus marketing qui racontent l’histoire des illustrations (châteaux, patrimoine archéologique…) présentes sur les timbres n’est pas une mauvaise idée en soi. Mais obliger les acheteurs de timbres à se trimbaler un livret de 12 pages qui ne tient dans aucun portefeuille, est-ce vraiment une bonne initiative ? Ceci est une question purement rhétorique… !

Il aurait été plus judicieux de proposer un livret séparé. Un lien internet ou un QRCode à scanner renvoyant vers des informations complémentaires sur les timbres auraient sinon été des alternatives intéressantes (plus écologiques, moins encombrantes, et sûrement moins coûteuses pour La Poste ! Mais bon, pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué…).

 

Content marketing ou pub ?

Passons sur ces différents inconvénients et découvrons l’intérieur du livret. Selon La Poste, le contenu offert gratuitement se veut « pratique, utile, ludique et pédagogique » (rien que ça !). Le moins qu’on puisse dire en tout cas est qu’il n’est pas de grande qualité : le style est basique, les informations données minimalistes, et surtout, il oscille en permanence entre content marketing et publicité. En témoigne la page sur les « Parcs naturels régionaux, protecteurs de notre patrimoine culturel » (un titre que je ne trouve pas très convaincant, mais ceci n’engage que moi !) , qui précise que le public scolaire est le bienvenu dans le Parc du Lubéron… alors que le parc n’apparaît même pas sur un des timbres du carnet !

D’autres publicités s’affichent plus clairement (on trouve pas moins de 5 pages de pubs éclectiques sur ce livret de 12 pages…) et viennent ruiner un peu plus la démarche engagée. Force est de constater qu’il ne s’agit pas d’un livret qui souhaite promouvoir le patrimoine français, mais bien de contenus commerciaux plus ou moins bien déguisés (et plutôt moins que plus). Le lecteur se sent déçu et leurré !

Mais à qui diable s’adresse ce carnet ?

La cible visée par les (pseudos) contenus marketing de ce mini-livret-carnet-de-timbres n’est pas très claire. Plusieurs hypothèses s’offrent à nous, mais aucune ne paraît vraiment convaincante. On pourrait croire que le livret s’adresse…

  • Aux enseignants : l’allusion au public scolaire les concerne
  • Aux philatélistes : plusieurs offres de collection de timbres sont exposées
  • Aux retraités : un abonnement au journal « Notre Temps » (magazine dédié aux seniors) est proposé
  • Aux jeunes : le registre familier (« La France comme j’aime ») choisi pour le titre et les jeux présents dans le livret ont sans doute pour but de le rendre plus attractif à leurs yeux.

Bref, 4 buyer persona se dessinent… Soit, d’expérience, au moins deux de trop ! A force de vouloir s’adresser à tout le monde, il y a fort à penser qu’au final, personne ne se sentira concerné…

En bref : les 5 raisons d’échec de cette action de communication

On ne peut que conclure que cette action de communication engagée par La Poste est décevante. Pour ma part, le livret (moins les timbres, que j’ai laborieusement détachés) a rapidement fini à la poubelle !

Les 5 principales raisons de l’échec de cette démarche sont :

  1. Des messages qui manquent de cohérence
  2. Une cible non définie
  3. Des contenus de faible qualité
  4. Un support de diffusion inadapté
  5. Et surtout, une démarche ambigüe, qui adopte en apparence les codes du content marketing mais ne les respecte pas (soit qu’ils aient été mal compris, soit qu’on veuille volontairement induire le consommateur en erreur, mais dans quel but ?).

Une stratégie de contenu, ça ne s’improvise pas !

Partons du principe que La Poste était de bonne foi et pensait réellement proposer du contenu utile. Si tel est le cas, il nous semble percevoir deux principaux problèmes à l’origine de ce flop :

  • Un manque de réflexion (et d’accompagnement ?) sur la démarche. Sans doute le groupe de travail a-t-il entamé la phase de production du livret sans passer par une phase préparatoire approfondie, qui aurait permis de réfléchir au bon canal, à la cible, aux types de contenus souhaités, à la conception d’une charte éditoriale, etc.
  • Un manque de recul sur l’importance du contenu délivré. Si l’on en croit les informations données en deuxième de couverture, le groupe s’est entouré de professionnels pour l’aspect conception graphique du livret. Mais pas pour l’aspect rédactionnel, comme si ce dernier ne revêtait qu’une importance mineure, alors qu’il est le cœur de toute stratégie de content marketing réussie !

Soyons optimistes : ils ne pourront que faire mieux la prochaine fois !

Et vous, qu’avez-vous pensé de cette stratégie de contenu menée par La Poste ? Faites-nous part de vos commentaires.

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Gabriel Dabi-Schwebel

Ingénieur de formation j’ai commencé ma carrière dans le conseil en télécom et en média. J’ai aussi monté de multiples projets entrepreneuriaux, marque de bijoux, bar à jus de fruits, éditeurs de logiciel avant de créer 1min30 en 2012, la première agence en Inbound Marketing en France. Avec 1min30, nous avons piloté les stratégies digitales de centaines d’entreprises mais aussi développé un blog qui a plus de 300K lecteurs par mois, une communauté de plus de 100K abonnés sur l’ensemble des nos réseaux sociaux et une maison d’édition dans laquelle nous publions nos livres et ceux de nos clients. Depuis 2017, je suis ainsi l’auteur et coauteur de 8 livres sur le marketing et la vente, dont 5 de méthodes basées sur l’intelligence collective : Acquisition Strategy Design, Customer eXperience ReDesign, Brand Strategy Design, Q2C Selling et 3 méthodes marketing pour les RHs Aujourd’hui, 1min30 fait partie des 3 plus grandes agences HubSpot en France. Nous avons fait des intégrations les plus complexes notre spécialité et proposons à nos clients un accompagnement complet sur la solution alliant conseil, intégration, formation et agence. Contactez moi si vous souhaitez dépasser les objectifs de leur investissement CRM.